Le 13 septembre dernier à Strasbourg, le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a prononcé son troisième Discours sur l’état de l’Union devant le Parlement européen. Après un rappel des derniers accomplissements de l’UE, le chef de l’exécutif européen a présenté ses propositions pour « une Europe plus unie, plus forte et plus démocratique d’ici à 2025« .
La réforme des institutions européennes
Le caractère ambitieux de ce nouveau Discours sur l’état de l’Union se traduit par la volonté forte du président de la Commission de réformer les institutions européennes : il souhaite en effet fusionner les présidents de la Commission européenne et du Conseil européen afin de rendre l’UE plus compréhensible auprès de ses partenaires. Il a également ajouté cela montrerait que l’Union est « proche des Etats et des citoyens« .
Autre point important de cette partie de son allocution : Juncker a tenu à présenter ses vélléités de création et de modification de certains hauts postes européens. Ainsi, il a mentionné la nomination d’un ministre des Finances de la zone et la fusion du poste de vice-président de l’Eurogroupe avec celui de commissaire de l’Economie et des finances.
La cybersécurité
Face aux diverses cyberattaques mondiales qui ont eu lieu ces derniers mois, le chef de l’exécutif européen a exprimé son projet de renforcement de la cybersécurité en Europe afin de mieux protéger les citoyens à l’ère du numérique : « Les cyberattaques sont parfois plus dangereuses pour la stabilité des démocraties et des économies que les fusils et les chars. Rien que l’année dernière, on a enregistré plus de 4 000 attaques par rançongiciel et 80% des entreprises européennes ont connu au moins un incident lié à la cybersécurité« . Insistant sur le fait que ce type d’attaques peut affecter quiconque sur n’importe quel territoire, Juncker a annoncé la création d’une Agence européenne de cybersécurité pour prévenir et contrer au mieux ces problèmes d’ordre informatique.
Le réchauffement climatique
La lutte contre le réchauffement climatique est plus que jamais au coeur des priorités de l’Union européenne. En réaction au récent retrait des Etats-Unis de l’accord de Paris sur le climat, il a été annoncé une présentation d’ici novembre de propositions de réduction des émissions de carbone dans le secteur des transports. La direction générale de l’Action pour le climat de la Commission européenne exposera ses projets de standards d’émissions de CO2 pour les voitures construites après 2020.
Le commerce
La question du commerce, avec ses exploits et ses controverses, a elle aussi été abordée par Jean-Claude Juncker, qui a plaidé, dans son discours, pour un renforcement du programme commercial européen. S’il a bien fait comprendre que l’Europe était « ouverte au libre-échange« , il a cependant souligné la nécessité de transparence des négociations d’accords et de réciprocité de la part des autres pays qui commercent avec l’Union. En outre, il a mis l’accent sur la défense des intérêts stratégiques de l’Europe : « C’est la raison pour laquelle nous proposons aujourd’hui un nouveau cadre de l’UE sur l’examen des investissements – « Investment Screening » en anglais. Si une entreprise publique étrangère veut faire l’acquisition d’un port européen stratégique, d’une partie de notre infrastructure énergétique ou d’une de nos sociétés dans le domaine des technologies de défense, cela ne peut se faire que dans la transparence, à travers un examen approfondi et un débat. Il est de notre responsabilité politique de savoir ce qui se passe chez nous afin d’être en mesure, si besoin, de protéger notre sécurité collective« . Cette mesure sera accompagnée d’un renforcement et d’un accroissement de la compétitivité de l’industrie en Europe.
La Turquie
Sur ce sujet, le président de la Commission européenne a été ferme et clair : tout projet d’adhésion de la Turquie à l’UE est pour l’instant exclu. Les multiples dérives du président Recep Tayyip Erdogan ont en effet bouleversé les relations diplomatiques entre l’Union et la Turquie. Jean-Claude Juncker a condamné l’enfermement des journalistes turcs et européens dans le pays et a sommé l’Etat : « J’adresse aujourd’hui un appel aux responsables en Turquie, libérez nos journalistes et pas seulement les nôtres, cessez d’insulter nos États membres, nos chefs d’État et de gouvernement en les traitant de fascistes et de nazis. […] La place des journalistes est dans les rédactions, là ou règne la liberté d’expression, leur place n’est pas dans les prisons.« , a-t-il déclaré devant le Parlement européen. Aujourd’hui, la Turquie se positionne à la 155ème place sur 180 au classement 2017 de la liberté de la presse établi par Reporters sans Frontières (RSF).
Le contrôle des travailleurs détachés
Après avoir souligné la reprise économique de l’Europe au début de son discours, Jean-Claude Juncker a mis l’accent sur la nécessité d’un meilleur contrôle des travailleurs détachés sur le territoire. C’est ainsi qu’il a proposé la création d’une « nouvelle autorité européenne de contrôle et d’exécution de ces mesures » pour surveiller partout dans l’UE la mise en oeuvre des dispositions encadrant le recours aux travailleurs détachés. Sujet fortement controversé et débattu, notamment en France, la directive européenne des travailleurs détachés est accusée de favoriser le dumping social au sein de l’Union. « Dans une Union entre égaux, il ne peut y avoir […] de travailleurs de deuxième classe. Ceux qui effectuent le même travail au même endroit doivent pouvoir obtenir le même salaire », a expliqué le président de la Commission européenne.
Les valeurs européennes
Enfin, l’accent a été mis sur le besoin de préserver les valeurs qui font de l’Europe un territoire respectueux des droits de l’homme. « Une Union des valeurs« , c’est le sixième scénario proposé Jean-Claude Juncker lors de son discours qui fait référence aux cinq perspectives imaginées pour l’UE dans le dernier Livre blanc de la Commission sur le futur de l’Europe. « Dans mon sixième scénario, l’Europe repose sur trois principes fondamentaux, que nous devons toujours défendre et promouvoir : la liberté, l’égalité et l’état de droit.« , a-t-il alors expliqué. Le chef de l’exécutif européen a ensuite fait part de son intention de continuer à promouvoir l’égalité dans tous les domaines (professionnel, alimentaire etc) à tous les citoyens et tous les pays de l’Union européenne. En réaction aux dernières transgressions et provocations commises par la Pologne et la Hongrie, Jean-Claude Juncker a tenu à rappeler l’ambition majeure de l’UE : « L’état de droit n’est pas une option dans l’Union européenne. C’est une obligation. Notre Union n’est pas un Etat, elle est une communauté de droit.«
Virginie CARDOSO
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