Fémin’histoire #5 : Rosalind Elsie Franklin

Qui sait encore aujourd’hui que c’est une femme qui a découvert l’ADN? Peu de monde. Rosalind Elsie Franklin, chercheuse et scientifique britannique s’était fait voler ses travaux et un prix Nobel en 1962. Le 25 juillet dernier, Google entamait sa réhabilitation avec un Doodle. Portrait d’une femme oubliée par l’Histoire. 

 

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Crédits photo : focus.tv5monde.com

 

Rosalind Elsie Franklin naît à Notting Hill le 25 juillet 1920. Biologiste moléculaire, elle a participé de façon significative à la découverte de l’ADN. Son histoire commence réellement en 1945, lorsqu’elle obtient un doctorat en physique-chimie à la prestigieuse université de Cambridge, au Royaume-Uni. Elle dédiera cependant ses premières années de chercheuse à la France, puisqu’elle travaillera de 1947 à 1950, au laboratoire central des services chimiques de l’Etat. C’est ici qu’elle apprendra les techniques de diffractométrie des rayons X.

En 1951, souffrant probablement du mal du pays, elle rentre en Angleterre et obtient un poste au célèbre King’s College de Londres. Elle réalise alors plusieurs clichés radiographiques de l’ADN, qui seront montrés, à son insu, à Maurice Wilkins et James Dewey Watson.

Des clichés déterminants

La communauté scientifique -d’alors et d’aujourd’hui- disent bien que sans ces clichés spectaculaires, la découverte de la structure à double hélice de l’ADN aurait été bien plus longue.

En 1953, la vie de Rosalind Franklin bascule lorsqu’elle découvre -avec stupéfaction sans doute- que deux scientifiques, James Dewey Watson et Francis Crick, annoncent dans le magazine Nature, avoir mis au jour l’ADN et ses propriétés fabuleuses contenues dans sa double hélice. Rappelons que l’ADN (ou acide désoxyribonucléique) possède l’intégralité de l’identité génétique de l’être humain. Il est personnel et unique. Ce rapport avait été écrit en grande partie par Rosalind Franklin, mais il n’était pas signé. Comment prouver alors qu’elle en était l’auteur?

 Loin d’être sanctionnés pour le vol scientifique qu’ils viennent de commettre, ils seront récompensés par un prix Nobel de médecine, en 1962.

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Crédits photo : http://www.chm.bris.ac.uk

Bafouée par ses collègues masculins, oubliée par l’Histoire

Les morts ne peuvent pas se défendre. Watson et Crick le savent très bien. Lorsqu’ils obtiennent la consécration mondiale que leur apporte le Nobel, Rosalind Elsie Franklin est morte depuis 4 ans, d’un cancer des ovaires. L’Académie Nobel est claire concernant sa procédure d’attribution des prix : elle ne récompense jamais quelqu’un à titre posthume. Notre chercheuse ne peut donc pas faire partie des lauréates.

Dans leurs discours de remerciements, les trois nobélisés auraient pu lui rendre hommage et expliquer son rôle prépondérant dans cette découverte. Que nenni! Ils feront tous le contraire, et minimiseront son implication, oubliant sans doute que sans elle, ils n’auraient jamais eu l’opportunité de saisir cette distinction. Ils indiquent tout juste qu’elle a apporté « une contribution précieuse à l’analyse aux rayons X ».

En 1968, dix ans après sa mort, James Dewey Watson pousse même le vice jusqu’à dire, dans son livre La Double Hélice, qu’elle était une harpie moche et méchante. Cela lui sera à juste titre reproché par la communauté scientifique, mais le mal est fait à jamais.

La Marie Curie anglaise

Pur produit à la fois de la bourgeoisie juive anglaise, intellectuelle et commerçante, Rosalind Elsie Franklin avait tout pour énerver. Dotée d’uns solide caractère et d’une extrême honnêteté, elle préférait garder secrètes ses découvertes jusqu’à en être tout à fait sûre, plutôt que de les communiquer. Elle ne souhaitait pas être la risée de la communauté scientifique en cas d’échec.

Elle n’avait toutefois pas compris que la course à la plus grande découverte du XXème siècle était ouverte et qu’elle en tenait les éléments clés.

Morte prématurément d’un cancer des ovaires, certainement dû à une trop grande exposition aux rayons X -comme son homologue française, Marie Curie- elle sombrera dans l’oubli, jusqu’en 2017. Google lui rend alors hommage dans un Doodle.

Le monde scientifique, qui se devrait être pur et désintéressé, totalement voué à faire progresser l’espèce humaine, n’est pas toujours un long fleuve tranquille. Même en France, où l’on est fier des découvertes de Marie Curie, il ne faut pas oublier qu’elle est entrée au Panthéon en 1995 seulement, et qu’elle demeure, encore aujourd’hui, la seule femme enterrée dans ce temple de la reconnaissance pour ses mérites. Gageons que Simone Veil viendra en grossir les rangs!

 

Chloé LOURENÇO

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