Pour beaucoup en Europe, la Commission européenne est une institution surpuissant, peuplée de fonctionnaires européens à la botte des lobbies qui obéissent, au doigt et à l’oeil à leur président, un homme sorti de nulle part et installé au 13ème étage du Berlaymont par la seule grâce de Dieu. De là à dire que la Commission décide de tout tel un tyran monstrueux qui prive tous les Européens de leurs libertés, il n’y a qu’un pas. Et pourtant, tout cela est faux. Explications éclairées.
La Commission, kezako ?
La Commission européenne est l’une des principales institutions de l’Union européenne, avec le Conseil, le Conseil de l’UE et le Parlement. Elle a été créée par le Traité de Rome, en 1957, et possède un Commissaire européen par Etat membre. Pour l’instant, elle est donc composée de 28 Commissaires, mais cela changera avec le Brexit. Chaque Commissaire est proposé par les chefs d’Etat ou de gouvernement de chaque Etat membre, qui doivent, ensuite, passer un grand oral devant les eurodéputés. S’ils les jugent suffisamment convainquant, ces derniers les approuvent.
La Commission, comme n’importe quel organe, est dirigée par un président. A l’heure actuelle et jusqu’aux prochaines élections européennes, c’est le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker qui assure cette fonction. Le président ne sort jamais d’un chapeau, contrairement à ce que l’on peut croire. Il est choisit parmi les eurodéputés membres du groupe majoritaire au Parlement. Ainsi, en 2019, un nouveau président sera choisi parmi le groupe qui aura le plus d’élus au sein de l’hémicycle.
Le siège de la Commission se situe -comme presque toutes les institutions- à Bruxelles, dans le bâtiment Berlaymont. La fonction principale de la Commission européenne est de proposer et de mettre en oeuvre les politiques communautaires. Elle a donc l’initiative législative. Elle est également la gardienne des traités et veille à leur application. On pourrait donc résumer le fonctionnement de la Commission comme cela :

Un tyran surpuissant ?
A l’aube des élections européennes, on entend dans les média de plus en plus de fake news concernant la Commission. Pour beaucoup d’eurosceptiques -voire d’europhobes-, cette institution serait le mal incarné : un organe surpuissant et monstrueux qui jouirait de prérogatives tellement élevées qu’il priverait de libertés les Européens. Tous menés à la baguette, personne n’oserait rien dire ni n’aurait les moyens de lutter contre lui.
Nicolas Bay, vice-président du Rassemblement national et co-président du groupe Europe des Nations et des Libertés au Parlement européen depuis 2017, indique même dans Le Parisien « qu’il faut supprimer la Commission qui n’a pas de légitimité démocratique et qui détient aujourd’hui des pouvoirs exorbitants« . Aucune légitimité démocratique ? Ses membres sont tout de même élus par des gouvernements élus au suffrage universel direct, donc démocratiquement. Personne à la Commission n’est installé par l’opération du Saint-Esprit sur un fauteuil ad vitam aeternam !
Invité dans l’émission d’Alain Marschall et Olivier Truchot, le 5 mars dernier, Nicolas Bay a d’ailleurs réitéré ses propos. Selon lui, la Commission déciderait de tout, au mépris de la volonté des Etats, et imposerait ses idées ! Il faut néanmoins rappeler que si elle a l’initiative législative, elle ne fait que proposer. Tout est ensuite débattu par les députés européens au sein du Parlement. Le texte fait ensuite la navette avec le Conseil, exactement comme en France par exemple, où les textes circulent de l’Assemblée nationale vers le Sénat. En outre, la Commission n’a pas son mot à dire sur la politique de défense de chaque Etat.
Pour le vice-président du RN, la Commission est cependant l’homme à abattre. Pour cela, il faut modifier les traités, et cela ne peut se faire sans une unanimité des pays membres de l’UE. Aucun problème, assure-t-il. Si le groupe Europe des Nations et des Libertés devient la première force au Parlement européen, une minorité de blocage pourrait être obtenue. Par conséquent, cela aboutira à une ouverture des négociations.
Les idées reçues sur la Commission sont telles, que Arte en a même fait un petit reportage. Vous pouvez le retrouver ici
Vous l’aurez compris, la Commission est loin d’être le monstre tant décrié. Elle est essentielle au bon fonctionnement de l’UE puisqu’elle protège ses traités et s’assure de leur respect dans les Etats membres. Et comme elle n’impose rien, elle semble bien moins effrayante que ce qu’on dit d’elle. « You can’t judge a book by its cover » comme disent nos amis Britanniques !
Chloé LOURENÇO
Une réflexion sur “Omnipotente, la Commission ?”
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