En septembre dernier, Voix d’Europe vous faisait part de la situation au Nicaragua. Presque 6 mois après la situation reste inchangée.
La crise politique au Nicaragua débute le 18 avril 2018 par des manifestations contre une réforme de la sécurité sociale. Le mouvement s’est vite transformé en révolte nationale contre le régime corrompu et népotiste de M. Ortega.
La répression toujours d’actualité
Samedi 16 mars, Managua était, en état de siège. Une manifestation interdite par les autorités (contre le régime du président nicaraguayen Daniel Ortega) par les autorités a poussé à déployer des milliers de policiers antiémeute, dans les rues de la capitale. Les groupes d’opposants s’apprêtaient à défiler pour exiger la libération de « tous les prisonniers politiques », ils ont été pourchassés par les policiers qui ont fait usage de leurs armes et de gaz lacrymogène.
Même si aucun décès n’est à déplorer, les vidéos diffusées sur les réseaux sociaux, montrent des manifestants de tous âges frappés par les forces anti-émeute avant de les embarquer. Des journalistes qui couvraient la mobilisation ont également été agressés.
Cent soixante-quatre opposants ont été arrêté puis relâchés quelques heures plus tard. Les personnes libérées ont chanté« Le peuple uni ne sera jamais vaincu », après une journée de violences policières. Les négociations engagées entre le gouvernement et l’opposition pour tenter de sortir d’une crise politique qui dure depuis onze mois ont été encore une nouvelle fois mise à mal suite à cette répression.
Une réouverture du dialogue très difficile
Parmi les 164 détenus libérés figuraient de grands noms de l’opposition qui participaient notamment, depuis le 27 février, aux négociations avec le gouvernement. En tête, l’avocate Azahalea Solis et le leader étudiant Max Jerez, membres de la délégation de l’Alliance civique pour la justice et la démocratie (ACJD), qui regroupe les représentants des étudiants, du patronat, des organisations de la société civile et des syndicats.
L’opposition est claire dans ses demandes: outre la libération des prisonniers, elle réclame le rétablissement des libertés publiques, une réforme de la loi électorale, des élections anticipées et la fin d’une répression qui a fait 325 morts et plus de 700 prisonniers, selon les organisations de défense des droits de l’homme.
Les négociations ne sont pas faciles car les positions restent fixes, le bloc étudiant de l’ACJD s’était, par exemple, retiré temporairement des négociations, considérant « insuffisantes » les libérations successives de 150 opposants jusqu’alors assignés à résidence, depuis la reprise du dialogue fin février, après sa suspension en 2018.
Après les faits de samedi 16 mars, Carlos Tünnermann, négociateur en chef de l’ACJD affirme qu’« Il est désormais impossible de revenir à la table des négociations alors qu’Ortega démontre qu’il veut résoudre la crise par la violence ».
Indignation internationale
La reprise de la répression a provoqué une vague d’indignation internationale. L’ambassade des Etats-Unis a notamment dénoncé sur son compte Twitter un « usage excessif de la force ». Le voisin Costa Rica est sur la même longueur d’onde, le pays a accueilli plus de 40 000 Nicaraguayens depuis le début des contrastes. José Miguel Vivanco, directeur de la division Amériques de l’organisation de défense des droits de l’homme Human Rights Watch, demande à la communauté internationale d’accentuer les sanctions contre le régime.
Le Parlement européen a aussi pris des mesures contre la forte répression du gouvernement nicaraguayen. Le jeudi 14 mars, une résolution prévoyant notamment le gel des comptes bancaires en Europe de plusieurs hauts fonctionnaires nicaraguayens a été adoptée par Bruxelles. Une mesure similaire avait déjà été adoptée, en décembre 2018, par Washington, qui a aussi limité l’accès du Nicaragua aux prêts internationaux.
L’économie du pays vacille. Le PIB a reculé de 4 % en 2018 et pourrait chuter de 11 % cette année. La date butoir du 28 mars fixée par les négociateurs du gouvernement et de l’opposition pour trouver une solution à la crise, mais après les faits du 16 mars cette date semble s’éloigner de plus en plus.
Natacha Da Rocha