Défenseure du suffrage universel et mère fondatrice de la République italienne, voilà en quelques mots le parcours de Nilde Iotti, née à Réggio d’Emilie le 10 avril 1920. Cette résistante deviendra, dans les années d’après-guerre, une des figures les plus importantes d’Italie. Certains disent même d’elle qu’elle est probablement « la meilleure présidente que l’Italie ait jamais eu ». Rien que ça. Européenne convaincue, elle siégera au Parlement européen jusqu’en 1979, et sera également élue vice-présidente du Conseil de l’Europe en 1997.
Résistance communiste
Leonilde Iotti voit le jour le 10 avril 1920 à Réggio d’Emilie en Italie, dans une petite ville pro-communiste du nord de l’Italie. Très jeune, elle se montre appliquée dans ses études et parvient même à décrocher une bourse à la prestigieuse université catholique de Milan, bien qu’elle fut une athée convaincue toute sa vie.

Le destin de la jeune Nilde -c’est ainsi qu’elle se fait appelée- bascule avec la guerre. Fermement opposée aux nazis, elle s’engage dans la résistance communiste, et devient par conséquent, une figure emblématique du Parti communiste italien. Une fois le conflit terminé, elle luttera pour les femmes, en fondant le syndicat des femmes italiennes, sous domination du PCI. En 1946, les femmes obtiennent le droit de vote en Italie, et beaucoup lui seront reconnaissante de ses bonnes œuvres dans l’Italie d’après-guerre. Elle bénéficiera d’un soutien féminin considérable lorsqu’elle se présente à l’assemblée constituante, une chambre parlementaire chargée d’élaborer une nouvelle constitution républicaine. Nilde s’occupera de la politique familiale.
Elue parlementaire
En 1948, elle rejoint la Chambre des députés, une des deux chambres du parlement italien, avec le Sénat. Elle siégera à son poste de députée jusqu’en 1979, date à laquelle elle prend la présidence de la Chambre. Elle ne quittera son poste qu’en 1992, ce qui fera d’elle la première femme -et la première femme communiste !- à occuper une haute fonction institutionnelle en Italie. Confiante, assurée et impartiale, Nilde est considérée comme la « meilleure présidente que l’Italie ait connue ». Sacré compliment !
En 1964, Palmiro Togliatti décède, laissant le PCI sans chef. Elle prendra sa suite et tentera de moderniser le parti. Européenne convaincue, elle sera le visage pro-UE du parti. Elle expliquera d’ailleurs tout au long de sa carrière, que seule une intégration européenne peut réellement mener à une évolution sociale majeure.
«Nous voulons une Union européenne […] pour ouvrir de nouvelles voies vers un plus grand développement civil, social et politique et de nouveaux horizons en matière de renouveau et de croissance que ne permettent plus les espaces étroits des États-nations, aujourd’hui trop restreints et donc limités dans leur souveraineté» (Nilde, Parole e Scritti, 1955-1998, Comitato per la costituzione della Fondazione Nilde Iotti)
Cela ne lui fait pas pour autant perdre de vue un autre combat : celui pour les droits des femmes. Elle travaillera d’arrache-pieds à faire voter une loi sur le divorce et l’avortement, ce qui constitue une avancée majeure. Faisant preuve de doigté, elle exhorte ses camarades à ne pas oublier de prendre aussi en compte l’avis des femmes catholiques sur ces deux sujets, ajoutant que les choses avancent toujours mieux dans le dialogue que dans le combat.

Mère du suffrage universel
Profondément attachée à l’idée du suffrage universel, certaine que cela apportera justice et équité en Europe, Nilde Iotti décide de porter son combat sur la scène européenne. Pour y parvenir, elle se fait donc élire au Parlement européen lors de la délégation de 1969. Durant tous les mandats qu’elle a occupés, elle a toujours prôné la nécessité d’avoir des élections directes au Parlement, déclarant que des élections par le peuple conférerait à l’institution une stabilité, une crédibilité et une légitimité inébranlable.
Elle sera récompensée de ses efforts en 1979, lorsque les premières élections au suffrage universel auront lieu.Elle quittera le Parlement peu après, 10 ans après y être entré. Mais son attachement à l’Europe ne s’arrête pas là. En 1997, elle est élue vice-présidente du Conseil de l’Europe, l’organisation des droits de l’Homme qui compte 47 membres. D’une Union à l’autre.
Après 53 ans de politique, Nilde Iotti annonce sa démission du Parlement italien en novembre 1999. Elle meurt deux semaines plus tard à Rome, le 4 décembre, à l’âge de 79 ans.
Chloé LOURENCO