Irlande : une frontière qui fait débat

A quelques mois de la sortie officielle du Royaume-Uni de l’Union européenne, la question irlandaise n’est toujours pas résolue et fait de plus en plus débat. Au lendemain du sommet européen, les négociations semblent encore loin d’aboutir. La raison ? L’Irlande du Nord bloque les pourparlers de Theresa May. Retour sur une petite province qui pourrait bien réactiver les tensions.

Bien qu’Emmanuel Macron ait dit lundi croire encore qu’un accord était possible entre l’UE et le Royaume-Uni, il est très peu probable que cela aboutisse. En effet, il reste encore des obstacles très importants, malgré la longueur des négociations. Rappelons que Londres avait deux ans, à compter du 30 mars 2017 pour engager les discussions et arriver à un accord. Nous sommes à six mois du Brexit, et la question irlandaise est encore en suspens.

L’Irlande est une île coupée en deux : le Nord est rattaché au Royaume-Uni, tandis que le Sud est indépendant. Si le Royaume-Uni quitte l’Europe, l’Irlande du Nord la quitte aussi, mais cela signifie le rétablissement d’une frontière avec l’autre moitié de l’île, avec des contrôles douaniers. Situation impossible, au vu des quelques 30 000 personnes qui la franchissent tous les jours. Sans oublier les tensions et les conflits qu’une telle démarcation raviverait.

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Une frontière maritime ?

Une des solution envisagée par Bruxelles pour sortir de l’impasse serait d’établir une frontière en plein milieu de la mer. Toutefois, cette solution n’a pas été retenue par Londres, car une frontière ainsi définie couperait en deux le Royaume-Uni. L’Irlande du Nord serait de facto intégrée à l’UE, alors que la Grande-Bretagne serait à l’extérieur. Une situation ubuesque.

Pour régler définitivement le problème, Michel Barnier, le négociateur européen, a proposé de mettre en place une frontière dématérialisée, avec des contrôles ponctuels sur les routes, éventuellement par vidéo, pour ne pas subir les blocages d’une frontière physique. Les seuls véritables contrôles physiques seraient réalisés pour les animaux vivants, pour éviter de transporter d’une région à l’autre des épidémies. Sur le papier, tout est réglé.

Le DUP campe sur ses positions

Dix députés du petit parti nord-irlandais, le DUP, ne veulent pas de la solution proposée par l’Europe. Unionistes jusqu’au bout des ongles, ils tiennent à ce que le Royaume-Uni reste « uni », solidaire et par conséquent, que l’Irlande du Nord reste accrochée au reste du pays. S’ils sont si puissants, c’est parce que Theresa May leur doit avant tout sa majorité au Parlement britannique : sans eux, elle ne tient pas. Cela provoquerait de nouvelles élections, et, potentiellement, la victoire de l’opposition travailliste. Impensable.

Une autre solution serait de proposer une union douanière temporaire, après le Brexit effectif. Mis là, ce sont les Conservateurs britanniques extrémistes qui s’y opposent catégoriquement, parce qu’ils veulent un « vrai Brexit », c’est-à-dire ne plus avoir rien à faire avec l’UE. Définitivement. Et eux aussi, s’ils n’avaient pas ce qu’ils souhaitent, mettraient en péril l’assise politique de Theresa May.

S’il n’y avait pas d’accord entre Londres et Bruxelles au 29 mars 2019, date à laquelle le Royaume-Uni fera sécession et où l’article 50 s’appliquera, on entrerait dans un univers inconnu. Qui a dit que le Brexit se ferait en douceur et sans semer le chaos ?

Chloé LOURENÇO